Siméon Chaumier

Au XIXè siècle, le propriétaire de l’hôtel Raoul attire l’attention de Lefeuve [Lef73] qui, tout en soulignant la filiation avec l’hôtel de Lesdiguières, écrit avec malice : « Des boiseries et des croisées dorées, qui ont conservé jusqu’aux vitres de l’époque de Louis XV, servent aujourd’hui d’ornements à cette habitation actuelle de M. Siméon Chaumier Tantôt romancier, tantôt poète, M. Chaumier manie la plume depuis une trentaine d’années, pour obéir à une vocation qui n’a jamais été douteuse. Cet écrivain tient son hôtel de son beau-père, M. Raoul, fabricants de limes, honoré sous l’Empire de distinctions particulières en qualité de grand industriel. Loin de nous la pensée que le gendre ait à recourir aux outils perfectionnés par feu Raoul ! Mais la réputation des vers sortis de cette maison n’arrive pas encore à la réputation de ses limes. Il est vrai que notre Balzac a dit : Le style trop lisse perd de sa vigueur. »

Siméon Chaumier

Littérateur né à Nantes en 1806, mort à Paris le 19 septembre 1860. Il vient à Paris en 1829 pour y étudier le droit, mais il déserte promptement les bancs de l’école pour embrasser la carrière littéraire. Il a publié des romans qui ont éveillé la curiosité : La tavernière de la cité, 1835 ; l’hôtel du Pet-au-diable, 1836 ; l’Évêque d’Autun, 1838 et plus tard des recueils de poèmes : Les Dithyrambes, 1838 ; les Auréoles, 1841. [Pre59] et d’autres œuvres : Napoléon III, 1854 ; Coup d’œil sur l’art religieux, 1855.

On le retrouve cité dans une lettre de son voisin de l’époque Victor Hugo à Juliette Drouet en date du 11 juillet 1834 : une heure après-midi « Je t’aime. Tu es mon ange. Je vais mieux. À bientôt. Je t’aime. Tu peux envoyer savoir de mes nouvelles sous le nom de M. Siméon Chaumier et de M. Charpentier

Il fut président du club de l’Arsenal, sis rue de Lesdiguières, fondé en mars 1848 : ce club rouge a pris une part très active à l’insurrection de juin 1848. Il fut même emprisonné quelque temps et Victor Hugo intervint pour sa libération.

Portrait de Siméon Chaumier [Bou04]

Les « calepins du cadastre » de 1845, 1862 et 1876, aux archives de Paris permettent de connaître les propriétaires successifs, ainsi que les locataires, étage par étage, avec une énumération des pièces composant les appartements. C’est ainsi que l’on peut savoir qu’au décès de Siméon Chaumier, sa veuve, Arsine Félicité Raoul hérita de l’hôtel et le conserva jusqu’à son décès en 1886, où l’hôtel échut par sa nièce, Pauline Bourse à Ferdinand Bourse, demeurant 14, rue Popincourt.

En 1845, le plus bel appartement dudit Chaumier au 1er étage est ainsi décrit : « à gauche du palier n° 7, pièce à feu sur jardin, beau salon à feu sur jardin, salle à manger, cuisine avec sortie sur escalier de dégagement donnant sur le jardin à droite de la salle à manger, couloir et lieux au fond, passage et galerie vitrée en saillie sur cour à gauche du passage, petit salon à feu, deux autres pièces à feu sur rue et sur cour, alcôve gothique, petite pièce à feu sombre, sortie sur escalier »

Dans les logements plus modestes que celui du propriétaire les habitants se succèdent, hormis quelques permanents comme le concierge M. Meunier qui est aussi marchand de vin à emporter, ou M. Denys de Hansy, conseiller à la Cour des comptes, perpétuant ainsi la tradition. Les autres habitants aux fils des ans sont des officiers de la garde républicaine, des courtiers ou des marchands en vins, des marchands de cristaux, de porcelaine, un entrepreneur de location d’immeubles, un droguiste quincaillier, un architecte, plusieurs veuves rentières, une revendeuse à la voilette en étalage, un maître maçon et un fabricant de casquettes, un étudiant, un graveur, des employés.

Références

[Bou04] C’est un plaisir de remercier Maître Yann Bourhis et sa grand-mère, Mme Bourse (†). Elle a habité l’hôtel avant sa démolition et nous a aimablement fourni ce portrait de Siméon Chaumier.

[Lef73] Ch. Lefeuve, Les anciennes maisons de Paris sous Napoléon III, tome I p.252, Paris, 1873

[Pre59] M. Prevost et Roman d’Amat, Dictionnaire de Biographie française, tome VIII p.862, Librairie Letouzy et Ané, Paris, 1959