Conclusion

Comme on vient de le voir, l’histoire de cette parcelle entre les rues Beautreillis et du Petit-Musc nous fait défiler concrètement la même histoire que celle décrite dans tous les livres sur le Marais. Le lotissement de ce nouveau quartier de Paris au XVIe siècle attire une clientèle fortunée qui bien vite va y bâtir ces hôtels entre cour et jardin dont il reste heureusement tant d’exemples, même si l’hôtel Raoul n’a pas survécu. De hauts magistrats, conseiller du Roi, trésorier de l’Épargne, possèdent cet hôtel au XVIIe et au XVIIIe siècle, tous plus ou moins alliés de famille ; pour beaucoup cette propriété n’en était qu’une parmi de nombreuses autres à Paris et en Province. Arrive la Révolution et son émigration : l’hôtel est confisqué, « partagé avec la Nation », les revenus de ces familles aristocratiques se tarissent. Même si l’Empire rend les biens confisqués à ses propriétaires, il leur faut vendre à un de ces représentants nouveaux de la société industrielle naissante. Jean-Louis Raoul, monté de son Rouergue natal est l’acquéreur de cet hôtel qu’il baptise fièrement de son nom. Pragmatique et bien qu’il se réserve le noble premier étage de l’hôtel qui porte son nom, il n’hésite pas à lui adjoindre deux ou trois étages supplémentaires et d’autres constructions annexes qu’il loue, tandis qu’il y installe les outils de son industrie de limes. Les locataires s’y côtoient, la mixité sociale fonctionne encore. Mais la dégradation se produit lentement, inexorablement. Avec la bonne conscience de faire œuvre d’hygiène, mais avec une opportunité qui n’est pas le fruit du hasard, l’hôtel vétuste est démoli au début des années 1960, juste avant la promulgation du plan Malraux.

Seul le portail échappe à la destruction. Mais son destin n’est pas rose et n’est toujours pas assuré.

Clef du portail de l’hôtel Raoul conservée par la famille. [Bou04]

Référence

[Bou04] C’est un plaisir de remercier Maître Yann Bourhis et sa grand-mère, Mme Bourse (†). Elle a habité l’hôtel avant sa démolition et nous a aimablement fourni cette photographie de la clef du portail.

1 thought on “Conclusion”

  1. Par pitié, n’ajoutez surtout pas de panneaux d’informations devant le portail, ce serait un véritable CRIME qui ôterait au lieu toute sa poésie ! Paris n’est pas un musée, et les passants n’ont pas besoin d’écriteaux tous les deux mètres pour leur signaler un bâtiment remarquable. S’ils veulent s’informer, les guides touristiques et Internet sont là pour ça !

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